EMMA

. . . et la salade ferroviaire

Mon frère et moi avons passé la majorité de notre enfance avec notre Nonna maternelle – La Signora Emma Paradisi – qui fut importée en 1985 de Milan à Ville Mont-Royal ou nous avons grandi. Nos parents étant musiciens, passaient la majorité de l’année en tournée au Québec et au Canada.

Bien qu’aujourd’hui je me considère très chanceux d’avoir eu une enfance hybride grandement infusée de culture Italienne, à l’époque j’étais moins à l’aise avec certains clash culturels auxquels j’étais confronté ou que je devais tenter d’expliquer auprès de mes amis du quartier. Comme quand j’avais des cailles dans ma boîte à lunch à l’école… Ou comme à chaque début de printemps, lorsque Nonna Emma sillonait les plates bandes ‘sauvages’ du chemin de fer qui passe à travers Ville Mont-Royal juste de l’autre côté de la rue de notre maison. 

Armée d’un petit couteau et d’un sac du dépanneur Perette, elle partait pour sa cueillette quotidienne de feuilles de pissenlits.

Cette cueillette, qui aux yeux du voisinage et de mes amis semblait très bizarre, servait aux salades qu’elle se faisait à chaque repas pendant les quelques semaines avant la période de floraison des pissenlits puisqu’après, les feuilles deviennent trop dures et trop amères.

Lorsqu’elle nous amenait avec elle pour les cueillettes du weekend, je me souviens que j’avais un peu honte sous les regards curieux des passants, mais au fond de moi, j’étais émerveillé que seule ma grand-mère savait comment cueillir et manger des plantes sauvages. 

Je l’imaginais comme une version italienne du druide d’Astérix et Obélix que j’adorais.

Emma Paradisi, 1988

Les feuilles des pissenlits sont une sorte de cicoria ou chicorée qui sont utilisées pour une multitude de plats italiens. Dans le nord de l’Italie, celle-ci est considérée comme remède printanier purificateur qui se mange généralement crue en salade afin de conserver les nutriments de la plante. À Rome, le 1er Mai, la tradition veut que la chicorée soit cuite avec des spaghettis et du pecorino. Dans les pouilles, les spaghettis sont remplacés par des fèves crues pour l’entrée typique du repas du 1er Mai « Fave, Cicoria e Pecorino ». 

C’est seulement après plusieurs années que j’ai pris goût à cette salade que je trouvais à un jeune âge trop amère. Aujourd’hui lorsque je la mange, je me souviens qu’ Emma me disait: « Ma dai! Mangia un pochino… che ti fa bene! » Allez! mange-en donc un peu… ça te fera du bien!

Emma la préférait en salade.

Feuilles de pissenlits crues coupés grossièrement
Huile d’olive
Vinaigre de vin rouge
Sel.

3 réflexions au sujet de “EMMA”

  1. Je déguste cette salade de pissenlit depuis mon enfance depuis 3 générations nous l’apprêtons comme ceci;
    Jeunes feuilles de pissenlit gros bouquet de ciboulette, crème fraîche, sel et poivre. Un vrai délice
    Marie-Claude Bégin
    Lots-Renversés
    Je tiens cette recette de mes grands-parents Pierre Dufour et Marie-Louise Gagné de Saint-Juste- du lac dans le Témiscouata

  2. Ma mère, périgourdine d’origine, ne manquait pas la période printanière de cueillette des jeunes pissenlits. En finale de sa salade, elle ajoutait un œuf mollet dont le jaune vif colorait la salade et versait en finale des lardons tout chauds qui cuisaient légèrement les feuilles. Un beau souvenir.

  3. Quanto sei fortunato ad aver avuto quelle esperienze con tua nonna. Era una grande insegnante. Non vedo l’ora che arrivi già la prossima primavera per mangiare le foglie del bambino!

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